La Cour européenne des droits de l’homme a communiqué aujourd’hui par écrit 32 arrêts, parmi lesquels l’affaire Travaš contre la Croatie (no 75581/13). Le requérant, Petar Travaš, est un ressortissant croate révoqué des deux postes d’enseignant qu’il occupait au motif qu’il s’était remarié.
Professeur de théologie, M. Travaš reçut de l’archidiocèse de Rijeka l’investiture canonique pour enseigner la religion catholique et, en septembre 2003, on lui offrit un contrat à durée indéterminée – avec salaire payé par l’État – pour enseigner cette matière dans deux lycées publics.
M. Travaš s’était marié religieusement en décembre 2002. Cependant, lui et son ancienne femme divorcèrent et il se remaria, cette fois civilement, en mars 2006. Le mois suivant, l’archidiocèse de Rijeka avisa M. Travaš qu’il ne pouvait plus désormais enseigner l’éducation religieuse parce que son nouveau mariage civil – intervenu alors que, aux yeux de l’Église, celui-ci était toujours marié à sa première épouse – était contraire à la doctrine chrétienne. Après avoir entendu M. Travaš à ce sujet, il lui retira son investiture canonique en août 2006. Huit jours plus tard, incapable de lui trouver un autre poste adéquat ou de lui proposer une autre fonction au sein de l’enseignement, l’éducation nationale révoqua M. Travaš de ses fonctions d’enseignant au motif qu’il ne pouvait plus enseigner l’éducation religieuse catholique en l’absence d’investiture canonique.
M. Travaš contesta sa révocation devant les tribunaux civils. Cependant, le 22 février 2007, il fut débouté par le tribunal municipal d’Opatija, qui conclut que le droit croate interdisait l’enseignement de l’éducation religieuse catholique en l’absence d’investiture canonique. L’appel formé par lui devant le tribunal de comté de Rijeka fut rejeté, ainsi que son pourvoi devant la Cour suprême et son recours devant la Cour constitutionnelle. Dans son arrêt du 27 mai 2013, la Cour constitutionnelle jugea en particulier que le Concordat en matière éducative et culturelle entre la République de Croatie et le Saint-Siège était un traité international ; qu’une loi ratifiant cet accord l’avait transposé dans l’ordre juridique croate ; que le Concordat primait la loi nationale ; et qu’il limitait l’enseignement de la religion catholique aux seuls enseignants titulaires d’une investiture canonique. Elle en conclut que la révocation de M. Travaš était parfaitement légale.
Invoquant en particulier l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale), M. Travaš estimait avoir été révoqué de ses fonctions d’enseignant dans le service public sur la seule base d’un événement éminemment personnel (son second mariage) et il y voyait une mesure extrême et disproportionnée portant atteinte à son droit à une vie privée et familiale.
La CEDH a jugé qu’il n’y avait pas violation de l’article 8.
Source Le Salon Beige