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Le RP Thomas Michelet (OP) analyse la note 351 d’Amoris laetitia pour Riposte catholique

Commentaires (25)
  1. PM de Montamat dit :

    L’idée est donc la suivante: plus ces couples de divorcés remariés vont pratiquer les sacrements, plus ils vont se convertir, jusqu’à s’apercevoir qu’ils sont en état de péché et alors ils feront quoi à votre avis ?

    Ils vont cesser d’avoir une attitude de gens mariés ? ils vont divorcer ? Ils vont se marier à l’église ?

    Avoir légitimé cette éventualité est d’un ‘jésuitisme’ assumé… Concrètement, ces gens sont supposés – tous les deux et en même temps ??? – faire une démarche de foi grâce aux sacrements. N’inverse-t-on pas les réalités surnaturelles dont il s’agit ?

    Cet article est très déroutant, on attendait un vrai sérieux d’après la présentation et la liste des intervenants convoqués. On se demande si cette réflexion est effectivement trop élevée pour le bon peuple, ou trop éculée…

    1. TM dit :

      Que l’article soit déroutant, c’est incontestable.

      Maintenant, que cette réflexion soit “trop élevée” ou bien “trop éculée”, comme vous dites, vous pouvez en juger d’après le commentaire de l’Abbé Guillaume de Tanoüarn sur Facebook :

      “Très bel article du Père Thomas Michelet qui va au bout du sujet.”

      https://www.facebook.com/FRTMOP/posts/10209750696585542?comment_id=10209753424333734&comment_tracking=%7B%22tn%22%3A%22R2%22%7D&pnref=story

      1. PM de Montamat dit :

        Je vais vous donner quelques précisions.
        Voilà le grand secret que dévoile Amoris laetitia ! Jusqu’ici, il était ‘coincé’ dans les confessionnaux. Attention, tenez-vous bien, vous allez tout savoir sur le péché, et même le péché mortel. Jusqu’ici, c’était vrai pour tout sauf le mariage, mais aujourd’hui, ça y est, on a trouvé l’antidote, ça se soigne non par la pénitence, mais par le discernement.
        C’est le thème fondamental de l’exhortation, explique le jésuite Spadaro, ami du Pape qui déclare (Radio Vatican) : ‘Le Pape dit qu’il existe une doctrine chrétienne dont le sens doit être radicalement ministère. Cela semble essentiellement pour moi le cœur, le moteur de l’Exhortation apostolique, la doctrine est radicalement ministère, elle sert – comme le dit le droit canon – pour le “salus animarum” salut, à savoir des âmes, du peuple.’ Que n’aviez-vous lu et compris le Pape avant ! ‘Le pape a toujours insisté sur la nécessité d’intégrer , même ceux qui ne sont pas en mesure de vivre dans la plénitude de la vie chrétienne.’ Le Cal Schönborn dit ‘inclure’ au lieu d’intégrer. Notez au passage que c’est le même argumentaire tenu à Mgr Fellay.
        A mon sens, plutôt que les textes du P. Michelet, l’interview du P. Spadaro explique la pensée du Pape. Il affirme : ‘Probablement la demande si le divorcé et remarié avoir accès aux sacrements ou non n’a pas de sens, car elle renvoie à l’idée d’une règle générale applicable à tous les cas, et positif ou négatif. Le pape démantèle cette logique et affirme l’importance du discernement face à des situations qui sont très différentes.’ Nominalisme ?
        Le super ‘directeur de conscience universel’, comme l’appelle (c’est très bien vu) l’abbé de Tanoüarn, est allé chercher dans une casuistique renouvelée par st Thomas, lui-même revisité par le nominalisme. Enfin ! Et dire que ce fameux article de st T, personne ne le connaissait ! Nul n’était parvenu jusqu’à la Ia-IIae question 19 ! Il faut maintenant ‘enseigner de manière christique’, nous dit l’abbé de Tanoüarn !
        De toute façon, il n’y a plus besoin de loi, par nature universelle, car il n’y a que des cas individuels, seule la personne existant réellement. D’où l’obsession de la casuistique chez le Pape François : la boucle est bouclée. Si le sujet vous intéresse, allez lire le regretté P. Pinckaers sur le sujet (‘Les sources de la morale chrétienne’ Cerf, 1993).
        Seule (à ma connaissance) l’analyse de Mgr Aillet aborde la problématique du nominalisme en morale. Après un rappel sur la morale il dit : ‘L’erreur serait de s’en tenir à la réflexion théologique incomplète qu’il (le Pape) propose […]’ [souligné par moi] Et c’est bien ça le problème, vu d’un regard très bienveillant.
        Voire aussi le discours de Pie XII aux participants du congrès de la Fédération mondiale des Jeunesses féminines catholiques du 18 février 1952.

        Pour conclure :
        Petit rappel pour le P. Michelet: «La conscience bonne et pure est éclairée par la foi véritable. Car la charité procède en même temps ” d’un cœur pur, d’une bonne conscience et d’une foi sans détours ” (1 Tm 1, 5 ; cf. 3, 9 ; 2 Tm 1, 3 ; 1 P 3, 21 ; Ac 24, 16) » (Catéchisme de l´Église Catholique, 1794). Cité par Mgr Schneider.
        C’est dans ce sens que je qualifiais la solution proposée d’irrecevable : il manque l’éclairage de départ qui est donné par la foi. Ca n’est pas la conscience qui est en premier… La petite conclusion du P. Michelet sur l’opposition des morales est vraiment bien ridicule, eu égard au contenu de son texte…

        Petit post-scriptum tiré d’une interview du P Michelet dans La Nuova Bussola
        ‘On ne juge pas l’agir de manière statique, mais on considère son dynamisme dans le temps. La question n’est plus alors de savoir seulement si l’on se trouve ou non dans une situation régulière, mais si l’on en prend résolument le chemin.
        La conscience est alors bien intégrée comme le point de départ dans l’accompagnement, même si ce n’est pas le point d’arrivée. En effet, elle doit être aussi éclairée, rectifiée, dans une maturation à la lumière de la Parole de Dieu (n. 303). De sorte que la loi aussi est intégrée comme présentant la vérité objective des exigences de l’Évangile. Elle doit être l’horizon réel de l’agir que l’on doit s’efforcer d’atteindre effectivement, même si cela peut nécessiter du temps et des étapes de conversions.’ [Souligné par moi]

        1. TM dit :

          @PM de Montamat

          Cette doctrine consistant à distinguer péché matériel et péché formel est parfaitement traditionnelle, ce que reconnaît l’Abbé Barthe dans sa réponse.

          Vous la trouveriez exposée par exemple chez Saint Alphonse de Ligori, et repris dans le Manuel des confesseurs de Mgr GAUME, 9e édition, Paris, 1865, p. 41-44
          (téléchargeable sur http://www.liberius.net/auteur.php?id_auth=3)

          Elle peut se réclamer de S. Thomas, qui distingue déjà au sujet du péché entre materialiter et formaliter.

          Que vous ne le sachiez pas, ce n’est que très normal. En l’accusant de modernisme, vous calomniez, mais vous le faites par ignorance. Et comme je ne suis pas sûr qu’il suffira de vous le dire pour que vous le compreniez, vous pourrez sans doute continuer longtemps à plaider l’ignorance.

    2. Daniel chaudron dit :

      “des personnes qui ne savent pas qu’elles sont dans le péché”…
      Sans être confesseur, ni théologien, ni même prêtre, je n’ai pas rencontré UNE seule personne divorcée remariée ignorant que ce comportement était fautif, du point de vue de l’Église.
      A quoi servent donc ces sermons (oups, pardon, ces homélies) interminables, ces 3 lectures par Messe (oups, pardon, eucharistie), ces 3 années A,B,C (on oublie le principe de base de la pédagogie: l’art de la répétition; Chaque année les mêmes lectures, ça finissait par “rentrer)?
      Les gens font semblant d’ignorer ce que tout le monde sait: le “remariage” (civil donc), n’est pas reconnu par l’Église. En fait, ils le savent très bien, puisqu’ils ne sont pas “repassés devant le Curé”!

  2. remond dit :

    c’est compliqué d’essayer de justifier l’injustifiable, je suis gravement déçu que riposte catholique fasse cela , maintenant il faudra vous appeler “riposte bergoglienne”, au fait c’est un péché mortel de faire de la masturbation intellectuelle?

  3. Rascol dit :

    Casuistique.

    1. Rheault, Alphonse dit :

      Oui! de la casuistique au sens noble du terme, qui signifie la recherche d’une plus grande vérité dans tel cas particulier! C’est du discernement avec l’aide de l’Esprit-Saint, évoluant dans le temps. À tous ceux qui trouve cela compliqué, complexe, je leurs conseille de prier l’Esprit-Saint, d’être patients et de faire confiance à nos pasteurs….peut-être qu’ils verront la lumière un jour! Personnellement, à partir de mes lectures et de mon expérience de vie (MD retraité de 71 ans marié depuis 47 ans) je suis convaincu de la justesse et de la nécessité de cette exhortation dans la ligne de “Familiaris consortio”mais qui va un petit peu plus loin dans l’application concrète.

  4. Lemaire dit :

    Mes frères,
    C’est incroyable ce que le mauvais esprit peut nous amener à dire ou faire, malgré tous les avertissements du Seigneur sur les pharisiens, l’oubli des versets que nous ne voulons pas “entendre” comme le pardon 7*70 fois (sauf le blasphème contre l’Esprit Saint)
    Nous risquons de devenir juge contre notre Pape de faire un scission des purs contre les autres…
    Bien pire nous penserions que l’Esprit serait donc impossible de guider ces impurs “remariés” vers la bonne solution.
    Quelle horreur… de se croire pur en ayant un coeur de pierre… de juger… (relire la lettre de Saint Jacques 4 11)…

    Et hop une heure d’adoration pour nous tous…et une réconciliation… (enfin…)
    Il y aura des pleurs et des grincements de dents… Attention … Attention Attention Attention Attention Attention Attention

  5. Alix dit :

    Si c’est de la “science de confessionnal”, comme le dit ce frère Michelet, que ne garde-t-on soigneusement cela dans les confessionnaux, si tant est que ces “cas” si éloignés de l’Eglise qu’ils ne comprennent pas la notion de péché se rendent réellement dans les confessionnaux, ce que j’ai du mal à croire. Plutôt que de balancer à la tête de fidèles déjà exténués un texte qui vient juste les anéantir tout-à-fait, on aurait pu imaginer de le garder au niveau des confesseurs, non ? Il est inadmissible que les clercs prennent les fidèles pour des truffes à ce point-là, pape en tête. Que les curés arrêtent de défendre l’indéfendable et se contentent d’annoncer HUMBLEMENT l’Evangile à temps et à contretemps, comme cela leur a été commandé par le Christ. Qu’aurait dit Saint Paul de tout cela, lui qui ne mâchait pas ses mots ?

    1. PM de Montamat dit :

      Excellent commentaire. C’est vrai que tout celà ne fait qu’ajouter de la pagaille.

      Vraiment trop, c’est trop !!!

      On se rend compte qu’à force de parler et de parler, le Pape François refroidit tout le monde.
      La baisse de fréquentation des audiences est drastique…
      Les chrétiens et les curés aussi en ont marre de se faire tirer dessus à boulet rouge.

  6. Père Christian dit :

    L’ACCÈS AUX SACREMENTS C’EST-A-DIRE AU BIEN PUBLIC DE L’ÉGLISE
    Dans cette contribution, nous nous limiterons à la situation des personnes « divorcées-remariées » essentiellement au regard du sacrement de Pénitence et de Réconciliation.
    Le sacrement de pénitence et de réconciliation est l’action liturgique de la célébration d’un sacrement
    Pour l’intelligence de cette réalité, il convient d’enchaîner et de croiser le c.959 (le sacrement de pénitence), le c.840 (les sacrements) et le c.834§1 (l’exercice ecclésial de la fonction de sanctification par la sainte liturgie).
    Suivant le c.959, les 3 actes du pénitent (contrition, confession, satisfaction) et l’acte du ministre (absolution) ne forment qu’un seul sacrement dans l’acte même de sa célébration. Le fruit de cet acte est simultanément le pardon de Dieu et la réconciliation avec l’Église (à comprendre en analogie avec le Verbe Incarné comme communion indivisiblement spirituelle et visible suivant Lumen Gentium n°8) que par son péché le pénitent avait blessée (Lumen Gentium n°11). Tout part donc de la notion de sacrement comme acte de manifestation à portée salvifique intégrale (réconciliation avec Dieu et avec l’Église indissociablement visible et invisible).
    Suivant le c.840, les sacrements sont, en tant qu’actions du Christ et de l’Église, des signes et des moyens d’expression et de croissance de la foi, d’accomplissement du culte rendu à Dieu, de sanctification des personnes et de réalisation de la communion de l’Église (toujours à comprendre dans sa double nature inséparablement visible et invisible suivant LG n°8)
    Enfin, suivant le c.834§1, l’Église remplit sa fonction de sanctification particulièrement par la sainte liturgie considérée comme l’exercice de la fonction sacerdotale du Christ, par lequel la sanctification est signifiée et réalisée par des signes sensibles, et le culte public intégral est rendu par le Corps mystique du Christ, Tête et membres (Ici, la référence à Pie XII, Mediator Dei, est patente).
    De cette longue énumération, on comprend qu’un sacrement n’est jamais d’abord un acte subjectif de la personne (mais d’abord du Christ et de l’Église indissociablement visible et spirituelle), ni un acte occulte (il y a bien une célébration, une manifestation, donc une action publique), ni un acte purement intérieur (tous les éléments intérieurs sont assumés dans leur manifestation), ni un acte purement individuel (l’Église indissociablement visible et invisible est toujours impliquée comme source et comme terme des actions sacramentelles, et le fidèle agit en tant que par son baptême il est constitué comme personne dans l’Eglise c.96 ou comme membre du Peuple de Dieu c.204, devant garder la pleine communion avec l’ensemble visible de l’Église, notamment par le lien et la célébration des sacrements c.205)
    De notre point de vue, il est donc impossible d’ouvrir l’accès aux sacrements et à la grâce qu’ils signifient et produisent, sur le seul critère ou sur le fondement premier des dispositions intérieures, ou de l’imputabilité subjective d’une faute grave à la personne. Le bien public de l’Église (la communion ad intra et la mission ad extra) est toujours premièrement impliqué dans la célébration des sacrements de l’Église, indissociablement visible et spirituelle, c’est-à-dire sacramentelle elle-même (Lumen Gentium n°1). Les sacrements célébrés ont leur source dans l’Église et leur terme dans l’Église, en passant par l’acte de participation active de la personne, une personne constituée dans l’Église et devant être appréhendée dans un statut qui n’est pas d’abord « légal » mais ontologico-sacramentel (le caractère baptismal) . Dans sa déclaration du 24 juin 2000, le Conseil Pontifical pour les Textes Législatifs avait explicitement adopté ce point de vue comme point de départ de la possibilité d’accès aux sacrements de l’Église et dans l’Église. Peu importe que les personnes « divorcées-remariées » maintiennent leur situation en esprit de défi ou non envers l’Église ou qu’elles aient réuni ou non les conditions subjectives de la réalisation d’un péché mortel dans le maintien de leur situation. C’est leur situation publique elle-même, qualifiée objectivement de « péché grave et manifeste » suivant le c.915, qui est en elle-même un état faisant obstacle à la célébration des sacrements. Autrement dit, la qualification de « péché grave et manifeste » ne se déduit pas d’une appréciation de l’état subjectif des personnes mais de la contradiction constatable et constatée que porte leur situation ou état de vie manifeste au devoir public de communion ecclésiale dans la pratique des sacrements sur le fondement de ce qu’ils sont. Plus proche de 1Co 11,27-29, et plus ajusté dans ses termes, le Code des canons des Églises Orientales parle des « personnes publiquement indignes » dans son c.712. Par là-même, le Code oriental montre exactement où se situe l’obstacle : non pas dans un péché consommé, car on n’en sait rien, et ce n’est pas le problème au regard de la célébration publique des sacrements, mais dans une situation publiquement indigne qui vient démentir publiquement la valeur divine des sacrements et de leur connexité, la communion à l’Église -sacrement, et compromettre publiquement le témoignage de l’Église, ce qui est qualifié pour cette raison de « péché grave et manifeste » au c.915. Vouloir sortir de cette optique en changeant de fondement d’appréciation, sur la base désormais des dispositions subjectives de la personne, revient à vider le c.915 de son sens et à entrer dans une lecture positiviste de la loi ecclésiale, laquelle est fondée avant tout sur l’ontologie de l’Église et de ses sacrements célébrés, à laquelle appartient nécessairement leur caractère public ou visible (Lumen Gentium n°1 n°8 et Sacrosanctum Concilium n°7). C’est pour cette raison que l’évitement du « scandale » n’est pas, comme l’affirment certains , un choix prudentiel lié à des conditions historiques, mais une réception authentique de la nature de l’Église, de la célébration des sacrements, et de la loi divine qui leur est interne .
    Suivant notre auteur , il est intéressant de noter qu’au cas où la personne divorcée-remariée, accompagnée dans le cheminement de sa conscience par l’aide de la grâce sans exclusion des sacrements, prendrait conscience de son péché, elle cesserait désormais de recevoir les sacrements tant qu’elle n’aurait pas décidé de lever l’obstacle tenant à sa situation s’opposant aux exigences de l’Évangile. Dans ce cadre dit « d’accompagnement spirituel », incluant « dans certains cas » la réception des sacrements, la réception des sacrements lui aura éventuellement fait prendre conscience qu’elle ne peut pas les recevoir ! On peut dire que cette logique éventuellement transgressive participe d’une conception « intimisée » ou individualisée des sacrements, appréhendés comme purs moyens de grâce, mais jamais d’abord comme signes, et pour cela jamais soumis de par leur nature même à des conditions publiques de réception, fondamentalement de célébration. On peut dire que cette logique aboutit à une dissolution de la célébration liturgique dans les options individuelles de la conscience, de l’Église-sacrement dans la somme de ses individus, de l’Incarnation de la grâce dans une conception et une pratique gnostiques où toute l’expérience chrétienne se fonde et se résout dans la prise de conscience de soi.
    On se demandera enfin sur quels critères l’absolution et la communion devront être administrées, non seulement par le prêtre accompagnateur de la personne, mais par les autres prêtres, et sur quels critères stables le fidèle divorcé-remarié pourra se voir garantir d’exercer son droit à la réception des sacrements suivant le c.213. On n’échappe pas si facilement à la canonicité dans l’Église. Par affaiblissement du caractère public de l’Église, de la condition statutaire du fidèle, de la célébration des sacrements, par évacuation de la canonicité dans l’espace chrétien, et dans l’exercice du ministère sacerdotal, on aboutira à une hyperpersonnalisation de la demande sacramentelle et de sa satisfaction. Or c’est justement cela qui fait perdre la conscience de la célébration des sacrements. Ainsi, le remède apporté au mal consistera dans l’administration de ce qui est à la racine du mal. Pourquoi constater une perte croissante de conscience si c’est pour l’accroître par disparition « au cas par cas » de l’interdit portant sur une contradiction grave et manifeste qualifiée de « péché grave » ou « d’indignité » suivant les 2 Codes ? Il est intéressant de lire le c.978§1 suivant lequel le prêtre a été constitué « ministre de la miséricorde aussi bien que de la justice ». Il est encore plus intéressant de lire le c.979, relatif à la discrétion requise du prêtre quand il pose des questions en confession, surtout en matière délicate . Pourquoi appliquer à une situation jugée grave par l’Église depuis toujours, publique et même notoire de fait, une praxis confessionnelle portant sur d’éventuels manquements dont la personne n’a pas conscience et qui portent sur son intimité conjugale ? Est-on dans le même ordre de faits quant à la publicité et aux dommages en justice induits envers l’Église et les autres fidèles ? Ya-t-il enfin, « dans certains cas », au regard de l’Évangile, une déclassification de l’adultère ?
    On peut se demander comment la notion de « scandale » est appréhendée dans l’Église, dans son droit et dans ses documents magistériels. Au c.2356 du Code de 1917, la situation des divorcés-remariés était qualifiée de « bigamie » en droit canonique pénal. Le Code de 1983 n’a pas suivi cette voie rigoureuse, tout en qualifiant cette situation durable de « péché grave et manifeste » selon les lectures interprétatives autorisées du c.915. Renvoi est alors fait au sacrement de pénitence et à la nécessité – de droit divin – de mettre un terme à la situation, au moins à la cohabitation « more uxorio », « au moins si le pénitent en avait conscience » . Ce dernier point restait cependant complexe, étant donné le caractère occulte de la non-cohabitation « more uxorio » qui pouvait avoir été décidée. Cela conduisait les cohabitants « comme frère et sœur » à cacher leur condition pourtant licite dans la célébration des sacrements. On voit ici que l’accompagnement des fidèles hors la perspective d’un statut public pose plus de problèmes qu’elle n’en résout, car le fidèle doit se situer et évoluer dans l’ensemble visible de l’Église et il en a le droit. Et on voit que le passage par l’accompagnement occulte de la conscience ne résoudra rien. La question du droit public de ces fidèles à recevoir les sacrements qui sont eux-mêmes des actions publiques, restera entière après Amoris Laetitia.
    Il faut espérer que la notion de « scandale » est toujours appréhendée dans l’Église selon les critères de l’Évangile (et du droit divin dans son ensemble) et non selon les critères de l’évolution sociale, suivant lesquels l’imputation d’adultère n’est désormais plus matière à diffamation en l’état actuel des mœurs .
    Un dernier point mérite d’être rappelé. À propos de l’administration valide et licite de l’absolution générale, le Motu proprio « Misericordia Dei » de Jean-Paul II en date du 7 avril 2002 dispose : « Il est clair que les pénitents qui vivent en état habituel de péché grave et qui n’entendent pas changer leur situation ne peuvent pas recevoir validement l’absolution. » Le document de Jean-Paul II étant une loi universelle, il convient d’abord de voir si, selon l’esprit du Législateur, l’impossibilité de la réception valide de l’absolution en ces cas « d’état habituel de péché grave » est de droit divin ou de pur droit ecclésiastique. Selon la déclaration interprétative du Conseil pontifical pour les textes portant sur la seule compréhension du c.915, l’impossibilité est clairement de droit divin. Elle est donc rétroactive , d’interprétation stricte , et n’ouvre pas à dispense . Dans le Motu Proprio précité, « ratione materiae », elle porte sur des situations, des états habituels, qui débordent largement la situation des divorcés-remariés, mais qui l’incluent. On fait référence à la notion de « péché grave » et non de « péché mortel », ce qui exclut la considération de l’imputabilité de la situation de péché grave à la personne. Dans ce cas, nous dit Jean-Paul II, sur le seul critère du refus d’un changement de situation objective, elle ne peut recevoir validement l’absolution sacramentelle. Ceci pourrait inclure des cas de consciences invinciblement erronées, et par conséquent des cas de personnes en état de grâce qui, tout en étant en état de grâce, ne pourraient se voir administrer validement l’absolution. Pour comprendre ce cas-limite, et les cas-limite font comprendre bien des choses, il faut se rappeler que les sacrements, actions de célébration, ne procurent pas d’abord la grâce mais qu’ils la signifient en premier lieu. Il faut se rappeler qu’ils sont des moyens parce que d’abord ils sont des signes, qu’ils sanctifient en signifiant. La célébration des sacrements, acte de nature publique, est donc liée à une participation publique qui n’en démente pas la signification d’une manière grave, publique, durable. L’incapacité des divorcés-remariés à célébrer les sacrements n’est donc pas d’abord de nature morale, mais sacramentelle, attachée à la sacramentalité de la célébration des sacrements, de l’Église-sacrement, et du fidèle lui-même dans l’ensemble visible de l’Église.
    Une des manières de remédier à cet obstacle de taille de se rallier à une considération analogique des situations conjugales au regard du mariage valide, sacramentel ou non, sur le fondement d’une autre analogie qui est de nature ecclésiologique. Mais les communautés ecclésiales protestantes et a fortiori les Églises orthodoxes sont analogiquement l’unique Église du Christ sur le fondement ontologique d’au moins 2 sacrements : le baptême et le mariage sacramentel. Par ceux-ci, et par d’autres sacrements chez les Orientaux séparés, les fidèles et leurs communautés participent réellement quoique de manière imparfaite à la sacramentalité de l’unique Église du Christ en laquelle subsiste l’Église catholique. Il y a donc une « analogia entis » entre ces réalités ecclésiales dont le premier terme est l’Église catholique et elle seule comme réalisation plénière de l’unique Église du Christ. Sur ce fondement, la vie chrétienne propre à ces Églises procède imparfaitement de la vie de l’unique Église du Christ en laquelle subsiste l’Église catholique, et peut y conduire, non cependant sans un acte de rupture appelé aujourd’hui « réception » dans la pleine communion de l’Église catholique.
    Il n’existe aucune analogie de cette espèce entre le mariage et ce qui n’en est pas un. Le c.1085§1, de droit divin naturel, est sans équivoque. Dans les autres situations même pavées de bonnes actions, il n’existe pas de lien. L’analogie entre ces situations et le mariage valide est donc purement nominale. On ne niera pas les qualités humaines des gens, on ne jugera pas du fond de leur âme, on s’ouvrira à tout ce donné vivant pour les accompagner dans leur croissance humaine et spirituelle. Mais on niera tout rapport réel entre la situation qu’ils ont créée et le mariage, naturel ou sacramentel. L’existence chrétienne et a fortiori la pastorale d’accompagnement ne peuvent se fonder sur un brouillage des mots, a fortiori sur un mensonge, consistant en l’occultation volontaire d’un mariage valide, éventuellement sacramentel, toujours existant jusqu’à preuve du contraire . Lorsqu’après la déclaration de nullité, un mariage éventuellement sacramentel pourra être célébré, il n’y aura plus analogie, mais identité entre la situation obtenue et le mariage, qui, entre baptisés, est une célébration, indissociablement publique et sacramentelle. Et si après un long parcours les personnes restaurent la fidélité effective au mariage toujours valide, en renonçant aux actes conjugaux dans la nouvelle situation qu’elles ont créée, ou dans la séparation qu’elles ont maintenue, elles témoignent dans leur chair de la signification et de l’effectivité de la célébration des sacrements, comme actions du Christ et de l’Église.
    La note n°351 d’Amoris Laetitia consacre-t-elle un changement de discipline contraire à la doctrine catholique ? D’emblée, nous pensons que non. Mais nous devons constater un changement de fondement concernant simultanément la nature et la discipline des sacrements, ou plus exactement la nature des sacrements à partir de la pratique espérée de leur célébration. Le fondement adopté est la capacité subjective de réception des personnes qui détermine directement l’idonéité à la célébration et finalement la nature de la célébration elle-même. Ici, le changement est considérable. Il affectera l’exercice du ministère des prêtres, rituellement sommés d’abandonner tout « légalisme » ou « pharisaïsme » dans une attitude de « conversion pastorale ». Il affectera surtout en pratique et par la pratique de l’accompagnement pastoral, l’économie entière de la Révélation, pourtant elle aussi sacramentelle, de par la Parole et la puissance salutaire du Verbe Incarné.

    1. TM dit :

      @Père Christian

      Cher Père,
      Vous pouvez ajouter à votre longue liste le VADE-MECUM POUR LES CONFESSEURS SUR CERTAINS SUJETS DE MORALE LIÉS À LA VIE CONJUGALE, du CONSEIL PONTIFICAL POUR LA FAMILLE (12 février 1997), qui va dans le même sens que mon article :

      7. Le sacrement de Réconciliation requiert de la part du pénitent une douleur sincère, l’accusation formellement intègre des péchés mortels et le ferme propos, avec l’aide de Dieu, de ne plus jamais retomber. En principe il n’est pas nécessaire que le confesseur cherche à savoir si les péchés, quant à leur malice, ont été commis à cause d’une ignorance invincible ou par une erreur de jugement non coupable. Quand bien même ces péchés ne seraient pas imputables, ils ne cesseraient pas pour autant d’être un mal et un désordre. Ceci vaut aussi pour la malice objective de la contraception: elle introduit dans la vie conjugale des époux une habitude mauvaise. Il est donc nécessaire de s’efforcer opportunément de libérer la conscience morale de ces erreurs(42) qui sont en contradiction avec la nature du don total dans la vie conjugale.

      Tout en considérant que la formation des consciences doit surtout être réalisée lors de la catéchèse générale ou spécifique aux époux, il est toujours nécessaire d’aider les conjoints, même au cours du sacrement de Réconciliation, à s’examiner sur les devoirs spécifiques de la vie conjugale. Si le confesseur estime qu’il est nécessaire d’interroger le pénitent, qu’il le fasse avec discrétion et respect.

      8. Sur le plan de la chasteté conjugale aussi, on doit considérer le principe toujours valable selon lequel il est préférable de laisser les pénitents dans leur bonne foi pour les cas où l’erreur est due à une ignorance subjectivement invincible, quand on prévoit que le pénitent, même s’il entend vivre de sa foi, ne changerait pas de conduite et en viendrait même à pécher formellement. Toutefois, dans ces cas aussi, le confesseur doit encourager ces pénitents, par la prière, par l’exhortation à la formation de la conscience, par le rappel de l’enseignement de l’Église, pour qu’ils accueillent dans leur vie le plan de Dieu, y compris dans ces exigences concrètes.

      9. La « loi de gradualité » pastorale, que l’on ne peut pas confondre avec la « gradualité de la loi » qui en amoindrit les exigences, consiste à chercher une rupture décisive avec le péché et un cheminement progressif vers l’union totale à la volonté de Dieu et à ses aimables exigences.(43)

      Notes :

      (42) « Si — au contraire — l’ignorance est invincible, ou le jugement erroné sans responsabilité du sujet moral, le mal commis par la personne ne peut lui être imputé. Il n’en demeure pas moins un mal, une privation, un désordre. Il faut donc travailler à corriger la conscience morale de ses erreurs » (Catéchisme de l’Église Catholique, n. 1793).

      « Le mal commis à cause d’une ignorance invincible ou d’une erreur de jugement non coupable peut ne pas être imputable à la personne qui le commet; mais, même dans ce cas, il n’en demeure pas moins un mal, un désordre par rapport à la vérité sur le bien » (Jean-Paul II, Enc. Veritatis Splendor, 8 août 1993, n. 63).

      (43) « Les époux, dans la sphère de leur vie morale, sont eux aussi appelés à cheminer sans se lasser, soutenus par le désir sincère et agissant de mieux connaître les valeurs garanties et promues par la loi divine, avec la volonté de les incarner de façon droite et généreuse dans leurs choix concrets. Ils ne peuvent toutefois considérer la loi comme un simple idéal à atteindre dans le futur, mais ils doivent la regarder comme un commandement du Christ Seigneur leur enjoignant de surmonter sérieusement les obstacles. “C’est pourquoi ce qu’on appelle la ‘loi de gradualité’ ou voie graduelle ne peut s’identifier à la ‘gradualité de la loi’, comme s’il y avait, dans la loi divine, des degrés et des formes de préceptes différents selon les personnes et les situations diverses. Tous les époux sont appelés à la sainteté dans le mariage, selon la volonté de Dieu, et cette vocation se réalise dans la mesure où la personne humaine est capable de répondre au précepte divin, animée d’une confiance sereine en la grâce divine et en sa propre volonté”. De même il appartient à la pédagogie de l’Église de faire en sorte que, avant tout, les conjoints reconnaissent clairement la doctrine d’Humanae Vitae comme norme pour l’exercice de la sexualité et s’attachent sincèrement à établir les conditions nécessaires à son observation » (Jean-Paul II, Exhort. Apost. Familiaris Consortio, 22 novembre 1981, n. 34).

  7. Benoît dit :

    “Mais le confesseur a en même temps le devoir d’éclairer la conscience déformée, afin de la reformer ; ce qui peut prendre du temps et requiert donc un accompagnement spirituel adéquat.”

    Certes oui, mais qui le fait encore ?
    En Corse, les confessionnaux sont vides ; ceux (bien peu nombreux) qui les fréquentent encore et connaissent un tant soit peu leur catéchisme ne savent plus trop à quoi s’en tenir (écart entre le discours du prêtre et l’enseignement de l’Eglise ; grande disparité d’un prêtre à l’autre ; prêtres notoirement peu fidèles aux promesses de leur ordination).
    Toutes les personnes se présentant pour recevoir la Communion la reçoivent effectivement. Aucun rappel préalable des conditions d’admission. D’ailleurs, il y a peu de chance désormais que beaucoup s’y plient.
    Touts les personnes demandant à être mariées le sont effectivement, et l’on n’a pas vraiment l’impression que l’accompagnement spirituel ait été adéquat (voir : https://www.youtube.com/watch?v=9mAjemCcGtg).

    “Du coup, le régime de Familiaris consortio est bien changé. Non pas dans le fait que des pécheurs conscients de leur péché grave vont recevoir la communion : cela n’est pas possible et ne le sera jamais. Mais dans le fait que des personnes qui ne savent pas qu’elles sont dans le péché peuvent recevoir « l’aide des sacrements » ; jusqu’à ce qu’elles prennent conscience de ce péché dans l’accompagnement spirituel. Elles cesseront alors de les recevoir, tant qu’elles n’auront pas changé leur état de vie pour se conformer pleinement aux exigences de l’Évangile”.

    Un peu naïf, non ? Dans les paroisses, et ce n’est pas nouveau, les prêtres donnent déjà la Communion à des personnes dont ils savent qu’elles vivent en concubinage, qu’elles sont divorcées et civilement remariées, qu’elles pratiquent l’homosexualité ou fréquentent les loges maçonniques. On en trouve dans les confréries, dans les sacristies, dans les sanctuaires derrière les micros, dans les chorales, dans la bureaucratie diocésaine … Et je ne sache pas qu’on ait jamais essayé de leur faire prendre conscience de leur péché.
    Alors quant à leur dire un beau jour : “vous ne pouvez plus communier” , cela me fait doucement rigoler !
    En réalité, les débats sur la communion suscités par “Amoris laetitia” sont très loin des questions que se posent – ou plutôt ne se posent plus – les prêtres, et par voie de conséquence, les fidèles désormais.

    “Or les progrès de la psychologie en même temps que les « progrès » d’une société confuse et sans repères font que de plus en plus de personnes ignorent ce qui était autrefois évident pour tous.”

    A qui la faute ?
    Catéchisme “coloriage-bons sentiments”, Messes face au peuple-en-français-pour-qu’on-puisse-comprendre”, absolutions collectives, ADAP, messes anticipées du samedi soir, “Pierres Vivantes”, “Prêtres Academy”, abandon du costume ecclésiastique, “messes des jeunes”, “messes qui prennent leur temps”, “dimanche autrement”, EAP, EAL, nouveaux secteurs paroissiaux …
    On récolte ce que l’on a semé !
    Alors au lieu de traiter (prétendument) les effets déplorés en abaissant ce qui devrait être au niveau de ce qui (malheureusement) est, soyons sérieux et attaquons-nous aux causes ! Il est vrai que cela suppose de se remettre en question, ce qui n’est pas le fort de nos évêques ni de nos prêtres.

  8. Rébécca dit :

    S’il vous plaît … Il ne s’agit pas de se prendre la tête pour tout comprendre, mais d’ouvrir notre coeur pour permettre à Dieu d’agir dans notre vie … la compréhension vient au fur et à mesure que nous offrons notre vie à la suite de Jésus .

    Rendons grâce à Dieu pour notre Pape François qui nous invite tous (lui, y compris ) à avoir en nous les sentiments du Christ ! Nous préparons ainsi le retour glorieux du Fils de Dieu !

    Nous cherchons des appuis pour construire notre vie, mais en dehors de la Pierre d’Angle (le Christ) il n’y en a pas d’autre, nous cherchons à les imposer aux autres mais c’est en ayant revêtu les sentiments du Christ que les Hommes de ce monde pourront y avoir accès …librement .

    Des réponses concrètes pour les divorcés ” remariés ” ?

    L’attitude du Christ ! ( l’Evangile regorge d’exemples ) .
    La sainte Eglise, par Lui, avec Lui et en Lui, nous suggère des réponses :
    par exemple :
    Pour être baptisés, petits enfants, nous avons parrain et marraine … Pour communier, pécheurs, nous pourrions avoir quelqu’un qui communie en esprit et en vérité, à notre place, pour nous .

    Ne croyons nous plus que les priants, religieux, religieuses le font chaque jour pour nous ?
    Si ! … à notre tour d’étoffer le réseau fraternel du Christ en revêtant ses sentiments .

  9. jpm dit :

    vous pensez vraiment que cela va aider au salut éternel ? vous croyez vraiment que la masse innombrable des clercs ignorants et peureux va s’appuyer la lecture de tous vos savants discours ? cette masse a déjà capituler et suivra la politique du chien crevé au fil de l’eau… cela a déjà commencé.
    Beaux discoureurs sur quelle planète vivez-vous ?

    1. Lemaire dit :

      Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité… GA 5 22/23
      Et nous dans quelles dispositions sommes nous quand nous publions nos commentaires?
      Ou idolâtrie, sorcellerie, haines, rivalité, jalousie, emportements, intrigues, divisions, sectarisme ? GA 5 20

      PS 49: n’étions nous pas en train d’aller à notre perte ?
      16 Mais à l’impie, Dieu déclare : + « Qu’as-tu à réciter mes lois, * à garder mon alliance à la bouche,
      17 toi qui n’aimes pas les reproches et rejettes loin de toi mes paroles ?
      18 « Si tu vois un voleur, tu fraternises, tu es chez toi parmi les adultères ;
      19 tu livres ta bouche au mal, ta langue trame des mensonges.
      20 « Tu t’assieds, tu diffames ton frère, tu flétris le fils de ta mère.
      21 Voilà ce que tu fais ; garderai-je le silence ? « Penses-tu que je suis comme toi ? Je mets cela sous tes yeux, et je t’accuse.
      22 Comprenez donc, vous qui oubliez Dieu : sinon je frappe, et pas de recours !
      23 « Qui offre le sacrifice d’action de grâce, celui-là me rend gloire : sur le chemin qu’il aura pris, je lui ferai voir le salut de Dieu. »

      Seigneur prend pitié de nous, de nos manques, délivres nous de tout mal…

  10. Mike dit :

    Dans un article publié sur le site de Famille chrétienne, vous posez la question suivante:
    «Donc si l’on n’a pas de péché grave en conscience, ne faut-il pas en conclure que l’on peut communier ?»
    http://www.famillechretienne.fr/eglise/vie-de-l-eglise/amoris-laetitia-ouvre-t-elle-la-porte-de-l-eucharistie-191452
    À mon avis, certaines personnes visées par le canon 915 peuvent ne pas pécher mortellement en conscience et ne pas pouvoir communier.
    En 1994, la Congrégation de la Foi a publié un texte dans lequel elle manifestait que la communion eucharistique n’est pas possible pour les divorcés-remariés parce que, objectivement, ils vont à l’encontre de la signification même de l’eucharistie. Que ces personnes soient ou non en état de péché mortel ne change rien à cette contradiction.
    « 3. Conscients, cependant, que la vraie compréhension et l’authentique miséricorde ne sont jamais séparées de la vérité(4), les pasteurs ont le devoir de rappeler à ces fidèles la doctrine de l’Eglise concernant la célébration des sacrements et, en particulier, l’accès à l’Eucharistie. Sur ce point, ont été proposées, dans diverses régions, durant les dernières années, différentes pratiques pastorales selon lesquelles une admission globale des divorcés remariés à la Communion eucharistique ne serait certainement pas possible, mais ils pourraient y accéder dans des cas déterminés, quand, en conscience, ils se sentent autorisés à le faire.
    Ainsi, par exemple, lorsqu’ils ont été abandonnés tout à fait injustement, bien qu’ils se soient efforcés sincèrement de sauver leur précédent mariage, ou quand ils sont convaincus de la nullité du mariage précédent sans pouvoir la démontrer au for externe, ou lorsqu’ils ont déjà parcouru un long chemin de réflexion et de pénitence, ou encore quand, pour des motifs moralement valables, ils ne peuvent satisfaire à l’obligation de se séparer.
    De diverses parts, il a aussi été proposé que, pour examiner objectivement leur situation effective, les divorcés remariés devraient nouer un colloque avec un prêtre prudent et expert. Ce prêtre cependant serait tenu de respecter leur éventuelle décision de conscience d’accéder à l’Eucharistie, sans que cela n’implique une autorisation officielle.
    Dans ces cas et d’autres semblables, il s’agirait d’une pratique pastorale tolérante et bienveillante visant à rendre justice aux différentes situations des divorcés remariés.
    4. Même si l’on sait que des solutions pastorales analogues furent proposées par certains Pères de l’Eglise et entrèrent en quelque mesure dans la pratique, elles ne recueillirent jamais le consensus des Pères et n’en vinrent jamais à constituer la doctrine commune de l’Eglise, ni à en déterminer la discipline. C’est au Magistère universel de l’Eglise qu’il revient, en fidélité à la Sainte Ecriture et à la Tradition, d’enseigner et d’interpréter authentiquement le dépôt de la foi.
    Face aux nouvelles solutions pastorales mentionnés ci-dessus, cette Congrégation juge donc qu’elle a le devoir de rappeler la doctrine et la discipline de l’Eglise à ce sujet. Celle-ci, fidèle à la parole de Jésus-Christ(5), affirme qu’elle ne peut reconnaître comme valide une nouvelle union, si le mariage précédent l’était. Si les divorcés se sont remariés civilement, ils se trouvent dans une situation qui contrevient objectivement à la loi de Dieu et, dès lors, ils ne peuvent pas accéder à la Communion eucharistique, aussi longtemps que persiste cette situation”(6).
    Cette norme n’a aucun caractère punitif ni certes discriminatoire à l’égard des divorcés remariés, mais elle exprime plutôt une situation objective qui par elle-même rend impossible l’accès à la Communion eucharistique: “Ils se sont rendus eux-mêmes incapables d’y être admis, car leur état et leur condition de vie est en contradiction objective avec la communion d’amour entre le Christ et l’Eglise, telle qu’elle s’exprime et est rendue présente dans l’Eucharistie. Il y a par ailleurs un autre motif pastoral particulier: si l’on admettait ces personnes à l’Eucharistie, les fidèles seraient induits en erreur et comprendraient mal la doctrine de l’Eglise concernant l’indissolubilité du mariage”(7).
    Pour les fidèles qui se trouvent dans une telle situation matrimoniale, l’accès à la Communion eucharistique sera ouvert uniquement par l’absolution sacramentelle qui ne peut être donnée “qu’à ceux qui se sont repentis d’avoir violé le signe de l’Alliance et de la fidélité au Christ, et sont sincèrement disposés à une forme de vie qui ne soit plus en contradiction avec l’indissolubilité du mariage. Cela implique concrètement, lorsque l’homme et la femme ne peuvent pas, pour de graves motifs – par exemple l’éducation des enfants – remplir l’obligation de la séparation, qu’ils prennent l’engagement de vivre en complète continence, c’est-à-dire en s’abstenant des actes réservés aux époux'”(8).
    5. La doctrine et la discipline de l’Eglise en la matière ont été amplement exposées durant la période post-conciliaire dans l’Exhortation apostolique Familiaris consortio. L’Exhortation rappelle, entre autres, aux pasteurs que, par amour de la vérité, ils sont tenus à bien discerner les diverses situations; elle les exhorte à encourager la participation des divorcés remariés à divers moments de la vie de l’Eglise. En même temps, elle rappelle la pratique constante et universelle, “fondée sur la Sainte Ecriture, de ne pas admettre à la Communion eucharistique les divorcés remariés”(9), en indiquant les motifs. La structure de l’exhortation et la teneur de ses paroles font comprendre clairement que cette pratique, présentée comme obligatoire, ne peut être changée sur la base des différentes situations.
    6. Le fidèle qui vit habituellement “more uxorio” avec une personne qui n’est pas sa femme légitime ou son mari légitime, ne peut accéder à la communion eucharistique. Si ce fidèle jugeait possible de le faire, les pasteurs et les confesseurs auraient, étant donné la gravité de la matière ainsi que les exigences du bien spirituel de la personne(10) et du bien commun de l’Eglise, le grave devoir de l’avertir qu’un tel jugement de conscience est en opposition patente avec la doctrine de l’Eglise(11). Ils doivent aussi rappeler cette doctrine dans l’enseignement à tous les fidèles qui leur sont confiés.»
    Le Cardinal Müller a rappelé la pertinence et l’actualité de ce texte en 2013:
    http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/muller/rc_con_cfaith_20131023_divorziati-risposati-sacramenti_fr.html
    Le cardinal Müller y traitait également de la doctrine de l’epicheia:
    « La doctrine de l’epicheia, selon laquelle une loi est certes valable en termes généraux, mais ne recouvre pas toujours adéquatement l’agir humain concret, ne peut pas non plus être appliquée dans ce cas, car l’indissolubilité du mariage sacramentel est une norme de droit divin, qui n’est pas à la disposition du pouvoir discrétionnaire de l’Église.»
    Pour ma part, les textes de l’Église me font conclure que les divorcés-remariés qui vivent habituellement « more uxorio » ne peuvent, de soi, recevoir l’absolution et l’eucharistie (donc, peu importe si ces personnes sont ou non en état de péché mortel.).
    Une lecture «in meliorem partem» d’Amoris Laetitia et de la note 351 ne permet aucunement de contredire l’enseignement du Magistère antérieur. C’est cette lecture qu’en fait, par exemple, le Père Angelo Bellon:
    «On peut également citer ce qui est écrit dans la note 351, à propos de l'”aide de l’Église” pour ceux qui vivent dans la grâce tout en se trouvant “dans une situation objective de péché” :

    “Dans certains cas, il peut s’agir aussi de l’aide des sacrements. Voilà pourquoi, « aux prêtres je rappelle que le confessionnal ne doit pas être une salle de torture mais un lieu de la miséricorde du Seigneur’ (Evangelii gaudium, 44). Je souligne également que l’Eucharistie ‘n’est pas un prix destiné aux parfaits, mais un généreux remède et un aliment pour les faibles’ (EG 47)”.

    Ici le pape ne dit pas “tout court” de donner la sainte communion aux divorcés remariés.

    Il prévoit que les personnes qui se sont repenties et qui vivent en état de grâce, c’est-à-dire sans avoir de relations adultérines ou de fornication, peuvent recevoir l’absolution et qu’elles peuvent prendre part à l’eucharistie, y compris en recevant la sainte communion, toujours ‘remote scandale’.» http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1351288?fr=y

    1. TM dit :

      Il ne faut pas tout confondre. Certains éléments dans la discipline que vous rappelez se fondent en effet sur la Loi divine et ne peuvent pas changer. Mais d’autres aspects relèvent davantage de choix prudentiels de l’Église, et il est donc possible de faire d’autres choix tout en restant fidèle à la loi divine. De plus, je ne dis pas que la lettre du Droit canonique ait été modifiée, ni même Familiaris Consortio. Simplement, par l’invitation à tenir compte du for interne, ce que l’on refusait jusque là, le pape change de l’intérieur la pratique. Non pas en changeant la règle, qui demeure, mais la pratique du confessionnal. Et il ne le fait pas d’une manière qui ne serait pas conforme à la doctrine catholique, car là non plus ce n’est pas possible. Les changements sont donc très limités, et contraints par des limites strictes, mais nier qu’il y ait des changements me parait intenable, tant il est évident que le texte veut les établir.

  11. Mike dit :

    Bonjour Père Michelet,

    Vous écrivez: «Pourtant, le pape a répondu en même temps de manière affirmative à la question de savoir si le texte changeait concrètement quelque chose pour l’accès à la communion des divorcés remariés : « Je peux dire : “Oui”. Point final ». Il est donc difficile de soutenir le contraire, et de maintenir contre le pape lui-même que rien n’a changé.»

    https://www.riposte-catholique.fr/riposte-catholique-blog/points-non-negociables-riposte-catholique-blog/rp-thomas-michelet-op-analyse-note-351-damoris-laetitia-riposte-catholique

    C’est un élément important de votre argumentation pour conclure que la discipline a changé. Mais d’où avez-vous tiré cela ? Peut-être d’un article de la Chiesa:

    «Et quelques jours plus tard, au cours du voyage aérien qui le ramenait de Lesbos à Rome, François a de nouveau proposé Schönborn en tant que principal exégète de l’exhortation post-synodale, en le qualifiant de “grand théologien [qui] connaît bien la doctrine de la foi”. Lorsqu’on lui a demandé si les divorcés remariés avaient maintenant, oui ou non, la possibilité de recevoir la communion, ce qui était exclu précédemment, la réponse du pape a été péremptoire et, pour une fois, sans équivoque : “Oui. Point. ». »

    http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1351283?fr=y

    Qu’en est-il au juste de la question du journaliste et de la réponse du Pape? Voyez vous-même si la Chiesa a rapporté correctement la question du journaliste et la réponse du Pape.

    D’abord en italien:

    (Francis Rocca, Wall Street Journal)

    Grazie Santo Padre! Vedo che le domande sull’immigrazione che avevo pensato sono state già fatte, e lei ha risposto molto bene. Quindi se mi permette vorrei fare una domanda su un altro evento degli ultimi giorni, che è stata la sua Esortazione Apostolica. Come lei ben sa, c’è stata molta discussione su uno dei molti punti – lo so che vi ci siamo concentrati molti – dopo la pubblicazione: alcuni sostengono che niente sia cambiato rispetto alla disciplina che governa l’accesso ai Sacramenti per i divorziati e i risposati, e che la legge e la prassi pastorale e ovviamente la dottrina rimangono così; altri sostengono invece che molto sia cambiato e che si sono tante nuove aperture e possibilità. La domanda è per una persona, un cattolico che vuole sapere: ci sono nuove possibilità concrete, che non esistevano prima della pubblicazione dell’Esortazione o no?

    (Papa Francesco)

    Io posso dire “si”. Punto. Ma sarebbe una risposta troppo piccola. Raccomando a tutti voi di leggere la presentazione che ha fatto il cardinale Schönborn, che è un grande teologo. Lui è membro della Congregazione per la Dottrina della Fede e conosce bene la dottrina della Chiesa. In quella presentazione la sua domanda avrà la risposta. Grazie!

    https://w2.vatican.va/content/francesco/fr/speeches/2016/april/documents/papa-francesco_20160416_lesvos-volo-ritorno.html

    Traduction:

    (Francis Rocca, Wall Street Journal)

    Merci Saint-Père ! Je vois que les questions sur l’immigration auxquelles j’avais pensé ont déjà été posées, et vous avez très bien répondu. Donc, si vous me le permettez, je voudrais poser une question sur un autre événement de ces derniers jours, à savoir votre Exhortation Apostolique. Comme vous le savez bien, il y a eu beaucoup de discussions sur l’un des nombreux points – je sais que nous sommes nombreux à nous y être concentrés – après la publication : certains soutiennent que rien n’a changé par rapport à la discipline qui régit l’accès aux sacrements pour les divorcés et remariés, et que la loi ainsi que la praxis pastorale et naturellement la doctrine demeurent telles quelles; d’autres soutiennent au contraire que beaucoup a changé et qu’il y a de nombreuses nouvelles ouvertures et possibilités. La question est pour une personne, un catholique qui veut savoir : y a-t-il de nouvelles possibilités concrètes, qui n’existaient pas avant la publication de l’Exhortation, ou non ?

    (Pape François)

    Je peux dire ‘‘oui’’. Point. Mais ce serait une réponse trop courte. Je vous recommande à vous tous de lire la présentation qu’a faite le Cardinal Schönborn, qui est un grand théologien. Il est membre de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et connaît bien la doctrine de l’Église. Dans cette présentation votre question aura sa réponse. Merci !

    En fait, le journaliste n’a pas demandé si les divorcés remariés avaient maintenant la possibilité de recevoir la communion. Il lui a demandé s’il y avait de nouvelles possibilités concrètes (Qu’est-ce que cela signifie au juste?). De plus, le Pape n’a pas répondu: «Oui. Point». Le Pape dit: «Je peux dire oui. Point.» Mais il insiste que ce serait une réponse trop courte. Et, pour une réponse adéquate, il recommande la lecture de la présentation faite par le cardinal Schönborn. Il dit même que c’est dans cette présentation que la question du journaliste trouvera réponse. Il est donc d’une extrême importance de référer à ce que dit le cardinal si on veut véritablement comprendre la réponse du Pape.

    Lors de cette présentation, en réponse à une question d’un journaliste, le cardinal Schonborn
    « (…) dit très clairement qu’il ne faut pas attendre, ni d’un Synode, ni de ce document, de nouvelles normes canoniques qui seraient valables pour tous les cas. N’attendez pas un changement de la discipline de l’Église.»

    http://fr.radiovaticana.va/news/2016/04/08/le_cardinal_schönborn_précise_le_sens_de_lexhortation_amoris_laetitia/1221214

    1. TM dit :

      J’ai lu tout comme vous ces textes. Et comme Sandro Magister lui-même le dit :

      François avait répondu, et Michelet le fait remarquer : “Je peux dire : oui. Point final”. Et il est sans importance que, peu de temps après, interrogé précisément à propos de la note 351, le pape ait également déclaré : “Je ne me souviens pas de cette note”. Parce qu’il reste ce fait incontestable : d’après François, il y a bien quelque chose de nouveau. Par conséquent on ne peut plus affirmer que ce qui est dit dans l’exhortation apostolique “Familiaris consortio” de Jean-Paul II reste valable, sans changements, un point c’est tout.

      François: “Je peux dire: oui. Point final”
      http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1351299?fr=y

  12. LE PERE THOMAS MICHELET REFUTE PAR SAINT THOMAS D’AQUIN (III p. question 80, article 4)

    THESE DE SAINT PAUL (1. Cor. 11, 28) :

    Que l’homme s’éprouve lui-même et qu’ensuite il mange de ce pain et boive de ce calice.

    ANTITHESE DU PERE THOMAS MICHELET (interprétation d’Amoris laetitia) :

    Que l’homme mange de ce pain et boive de ce calice et qu’ensuite il s’éprouve lui-même.

    1er argument du père Michelet :

    « Le pape est clair sur le fait que tout le monde est appelé à la conversion : « conversion missionnaire » pour les pasteurs ; conversion aux exigences de l’Évangile pour les pécheurs. Simplement, cette conversion ne peut pas être présentée comme un préalable et un obstacle infranchissable [à la communion eucharistique] ; mais elle doit être le but visé, vers lequel on se dirige résolument, même s’il faut du temps et des étapes pour cela. Dieu a toujours fait ainsi avec son peuple. »

    Réponse de saint Thomas :

    « Il faut répondre [au premier argument] que dans l’eucharistie comme dans les autres sacrements, ce qui est le sacrement est le signe de ce qui est la chose du sacrement. Mais dans l’eucharistie on distingue deux sortes de choses… : l’une qui est signifiée et contenue, c’est le Christ lui-même ; l’autre qui est signifiée et qui n’est pas contenue, c’est-à-dire le corps mystique du Christ qui est la société des saints. Par conséquent, quiconque reçoit ce sacrement signifie par là qu’il est uni au Christ et incorporé à ses membres : ce qui est produit par la foi formée (la foi animée par la charité, contrairement à la foi informe qui désigne la foi sans l’état de grâce), qui est incompatible avec le péché mortel. C’est pourquoi il est évident que celui qui reçoit l’eucharistie dans l’état de péché mortel, commet une fausseté dans ce sacrement et tombe pour ce motif dans le sacrilège, comme profanateur d’une chose sacrée, et par suite pèche mortellement… Le Christ apparaissant sous son espèce propre, ne se donnait pas à toucher aux hommes en signe de leur union spirituelle avec lui, comme il se donne dans l’eucharistie pour qu’on le reçoive. C’est pour cela que les pécheurs qui le touchaient dans son espèce propre n’encouraient pas le crime de fausseté à l’égard des choses divines, comme les pécheurs qui le reçoivent dans le sacrement. De plus, le Christ portait encore la ressemblance de la chair du péché, et c’est pour cela qu’il était convenable qu’il se laissât toucher par les pécheurs ; mais cette ressemblance ayant été détruite par la gloire de la résurrection, il a défendu à la femme, dont la foi manquait encore d’une certaine perfection à son égard, de le toucher (Joan. XX, 17) : Ne me touchez pas, dit-il, car je ne suis pas encore monté vers mon Père, c’est-à-dire, ajoute saint Augustin {Tract, CXXI in Joan.): Je ne suis pas tel que je dois être dans votre cœur. C’est pourquoi les pécheurs qui manquent de la foi formée à l’égard du Christ, sont empêchés de s’approcher de ce sacrement. »

    2nd argument du père Michelet :

    « Tout en distinguant les situations, Jean-Paul II avait maintenu la règle [d’interdire la communion aux divorcés-remariés], pour un motif pastoral et donc par un choix prudentiel, afin d’éviter le scandale. Il n’est donc pas contraire à la doctrine et à la loi divine que le pape François fasse un autre choix prudentiel, tenant compte de ces possibilités de distorsion de la conscience, tout en maintenant la règle d’éviter le scandale (AL 299). Ce n’est pas que l’on permette au pécheur de « s’arranger avec sa conscience » ; c’est qu’il faut désormais partir de beaucoup plus loin pour pouvoir réconcilier un pécheur avec l’Église. Parce que les consciences sont de plus en plus déformées, et qu’il faut donc d’abord les reformer pour leur permettre d’avancer sur un chemin de perfection… Le pasteur ne peut pas être comme un médecin qui dirait : « vous êtes malade, ce n’est pas bien, il ne faut pas ! » Mais il doit guérir, ou du moins faire tout son possible pour obtenir cette guérison, qui est fondamentalement l’œuvre de Dieu. Parfois, on peut le faire séance tenante, cela suffit. En général, ça prend beaucoup de temps, parce que la conscience est très déformée. D’où la nécessité d’un accompagnement sur la durée. »

    Réponse de saint Thomas :

    « Il faut répondre au second argument, que toute médecine ne convient pas pour toute espèce de maladie. Car le remède qu’on donne à ceux qui n’ont plus la fièvre pour les fortifier, leur nuirait, si on le leur donnait quand la fièvre est encore très-vive ; de même, le baptême et la pénitence sont aussi des remèdes purgatifs que l’on donne pour enlever la fièvre du pécheur, tandis que l’eucharistie est une médecine fortifiante qu’on ne doit donner qu’à ceux qui sont délivrés de leurs fautes. »

    3ème argument du père Michelet :

    « Il ne suffit pas de rappeler la loi de l’extérieur : encore faut-il que la personne la comprenne et l’accueille véritablement de l’intérieur. [Amoris laetitia] ne dit pas autre chose… Ce qui est sûr, c’est que ce texte est incompréhensible dans le cadre d’une « morale de la loi » qui est celle de Kant ou des jansénistes. Il est parfaitement recevable dans le cadre d’une « morale de la vertu » qui est celle de S. Thomas d’Aquin, « doctor communis ». »

    Réponse de saint Thomas :

    « Il faut répondre au troisième argument, (…) [qu’]il y en a qui (…) usent mal [des vertus de l’âme], comme d’objets qu’on peut mal employer, ainsi qu’on le voit à l’égard de ceux qui s’en enorgueillissent. De même l’eucharistie, considérée en elle-même, n’est pas le principe du mauvais usage, mais elle en est l’objet. D’où saint Augustin dit (Tract, LXII in Joan. circ, princ.) : Il y en a beaucoup qui reçoivent indignement le corps du Christ ; ce qui nous apprend avec quel soin nous devons éviter de recevoir mal ce qui est bon. Car le bien se change en mal quand on reçoit mal ce qui est bon ; au lieu que l’Apôtre, au contraire, a changé le mal en bien, quand il a bien reçu le mal, c’est-à-dire quand il a supporté avec patience l’aiguillon de Satan. »

    4ème argument du père Michelet :

    « Le régime de « Familiaris consortio » est bien changé. Non pas dans le fait que des pécheurs conscients de leur péché grave vont recevoir la communion : cela n’est pas possible et ne le sera jamais. Mais dans le fait que des personnes qui ne savent pas qu’elles sont dans le péché peuvent recevoir « l’aide des sacrements », jusqu’à ce qu’elles prennent conscience de ce péché dans l’accompagnement spirituel. Elles cesseront alors de les recevoir, tant qu’elles n’auront pas changé leur état de vie pour se conformer pleinement aux exigences de l’Évangile, d’après « Familiaris consortio ». Ce n’est pas que l’on fasse une exception pour elles ; c’est plutôt qu’on leur applique le régime général déjà établi pour tous les autres cas. « Familiaris consortio » rappelait qu’il n’était pas possible de donner la communion aux divorcés remariés, parce que l’on estimait qu’une telle ignorance était impossible dans leur situation. En effet, de même qu’on ne fait pas de péché sans le savoir ni le vouloir, de même on ne se marie pas sans le savoir ni le vouloir. Et donc, toute atteinte à la fidélité du mariage était nécessairement coupable. Ou bien, si la personne ne le savait vraiment pas, cela signifiait à coup sûr que son mariage sacramentel était nul « ab initio », qu’il n’avait jamais existé faute d’un vrai consentement à ce qu’est le mariage. Or les progrès de la psychologie en même temps que les « progrès » d’une société confuse et sans repères font que de plus en plus de personnes ignorent ce qui était autrefois évident pour tous. De sorte que ce qui était valable pour toutes les autres catégories de péchés le devient aussi pour les divorcés remariés. »

    Réponse de saint Thomas :

    « Il faut répondre [au quatrième argument], que si l’on n’a pas la conscience de son péché, ceci peut tenir à deux choses : 1° ce peut être par sa faute ; soit parce que, par suite de l’ignorance du droit qui n’excuse pas, on croit que ce qui est un péché n’en est pas un, comme si un fornicateur pensait que la simple fornication n’est pas un péché mortel ; soit parce qu’on a mis de la négligence à s’examiner, contrairement à ce que dit l’Apôtre (I. Cor. XI, 28) : Que l’homme s’éprouve lui-même et qu’ensuite il mange de ce pain et boive de ce calice. Le pécheur qui reçoit ainsi le corps du Christ n’en pèche pas moins, quoiqu’il n’ait pas la conscience de son péché, parce que son ignorance est elle-même une faute. 2° Il peut se faire que ce ne soit pas par sa faute ; comme quand il s’est repenti de son péché, mais sans être suffisamment contrit. Dans ce cas, il ne pèche pas en recevant le corps du Christ, parce que l’homme ne peut savoir avec certitude s’il est véritablement contrit ; et il suffit qu’il trouve en lui des signes de contrition, par exemple qu’il se repente de ses fautes passées, et qu’il se propose de les éviter à l’avenir. Mais s’il ignore que ce qu’il a fait était un acte coupable, à cause de l’ignorance de fait qui excuse ; par exemple, s’il s’était approché d’une femme étrangère, croyant que c’est la sienne, on ne devrait pas pour cela lui donner le nom de pécheur. Il en est de même s’il a totalement oublié son péché, la contrition générale suffit pour qu’il soit effacé… On ne doit donc pas non plus le considérer alors comme pécheur. »